Journée mondiale des migrants du 13 janvier 2013
La Journée mondiale des migrants du 13 janvier 2013
Chaque année, l’Eglise propose une journée pour nous sensibiliser à la vie des migrants dans le monde et dans nos communautés chrétiennes. Nous vivrons cette journée à Bussy le 13 janvier, avec nos amis de Chrétiens du monde.
Le thème de cette journée mondiale est : « Migrations, pèlerinage de foi et d’espérance ». Cela évoque immédiatement pour moi des images fortes. La première est une messe vécue en Tanzanie il y a 20 ans. Je venais en voiture dans un village et j’ai vu arrier des centaines de personnes à pied de tous les coins de l’horizon, comme en pèlerinage, pour célébrer ensemble dans la joie ce Jésus qui avait arpenté les chemins de Palestine et qui allait leur redire sa parole de foi et d’espérance.
La deuxième, c’était il y a quatre ans au nord du Cameroun. On m’avait demandé de venir accompagner les reliques de Ste Thérèse de Lisieux. Un matin, nous sommes partis en voiture avec le reliquaire. Sur la piste, pendant 20km, j’avais l’impression que personne n’habitait cette savane. Et puis tout à coup, au bout du chemin, là où la piste s’arrêtait, une église nous attendait … avec 400 personnes à l’intérieur, qui avaient entendu dire que nous allions venir et qui étaient arrivées avant nous, comme les gens qui avaient précédé Jésus sur l’autre rive du lac (Mc 6, 33-34). J’ai senti alors plus fortement combien la foi et l’espérance s’expriment d’abord par les pieds avant de s’exprimer par la parole.
La troisième image, c’était le 15 août dernier. J’étais à Lourdes avec des groupes de personnes ayant vécu de nombreuses galères dans leur vie, autant de Français que de migrants. Pour rejoindre la messe de l’Assomption, nous sommes descendus de la Cité St Pierre à travers les rues commerçantes de Lourdes dans une grande parade musicale colorée et joyeuse. Les touristes, les commerçants et les autres pèlerins étaient tout étonnés de cette marche. Nos amis migrants n’étaient pas en reste pour montrer qu’il y a de la joie à vivre la foi et l’espérance.
Ces trois événements m’ont fait redécouvrir le sens du mot Eglise. Pour les premiers chrétiens qui parlaient grec, c’est le mot ecclesia. Il y a le préfixe ek, qui signifie le mouvement de sortir, et puis le verbe kaleïn, qui veut dire appeler, lancer un appel. C’est l’appel à sortir de chez soi, pour se rassembler. C’est ce que Dieu a demandé à son peuple en l’appelant à sortir d’Egypte pour se rassembler au désert et découvrir Celui qui l’accompagnerait sur son chemin de vie.
Dans le mot Eglise il y a donc le mot pèlerinage. La foi et l’espérance, c’est un mouvement qui nous fait sortir de chez nous, de nos lits douillets ou de nos lits d’insomnies, de nos maisons barricadées sur notre clan ou de nos solitudes mortelles. Sortir, nous mettre en marche, répondre à un appel, nous « déplacer » intérieurement dans nos visions et nos opinions, pour découvrir ceux que nous n’attendions pas. Et pour, avec eux, aller à la rencontre de Celui qui a les paroles de la vie éternelle.
En écrivant ces lignes, je me rends compte que ce que j’ai écrit nous est révélé, en fait, par nos amis migrants. C’est bien cela qu’ils ont vécu et qu’ils vivent. Ils sont partis, ils ont répondu à un appel intérieur, dans l’élan d’une foi et d’une espérance pour eux et leurs familles. Ils nous révèlent quelque chose de fondamental au sujet de l’Eglise : être chrétien, être du Christ, c’est entendre cet appel à sortir de chez soi, à sortir de soi, pour se mettre en marche, en pèlerinage. Comme Abraham. Relisez l’histoire d’Abraham dans le livre de la Genèse : on a vraiment l’impression que son périple est raconté comme un vrai pèlerinage, d’étape en étape, avec toujours cette confiance à la parole de Dieu, dans la foi et l’espérance.
Je vous invite aussi à lire la lettre aux Hébreux, les chapitres 11 à 13. Elle nous parle justement d’Abraham : « Grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qui devait lui être donné en héritage. Et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, il vint séjourner comme étranger dans la terre promise. C’est dans un campement qu’il vivait. » (Heb 11, 8-9) L’itinéraire d’Abraham n’est-il pas une parabole de celui de beaucoup de nos amis migrants ? En entrant en contact avec eux, en les écoutant nous raconter leur pèlerinage, nous pourrons puiser à la source de leur foi et de leur espérance, pour irriguer notre propre foi et notre espérance.
Plus loin, nous lisons : « Jésus a souffert sa Passion en dehors de l’enceinte de la ville. Eh bien, pour aller à sa rencontre, sortons en dehors de l’enceinte, en portant la même humiliation que lui. » (Heb 13, 12-13) Nous retrouvons la définition de l’Eglise : il nous faut sortir, pour répondre à un appel de Dieu, mais il ne s’agit pas seulement de nous rassembler dans la joie de nous sentir bien ensemble, il s’agit de sortir pour rejoindre le Christ dans ceux qui vivent les mêmes humiliations que lui. Et nous savons bien qu’un nombre important de nos amis migrants subissent encore aujourd’hui des humiliations. Certains même sont conduits « en dehors de l’enceinte de la ville ».
La démarche Diaconia 2013 va nous aider à découvrir à travers la rencontre des migrants, en particulier des plus démunis d’entre eux, que nous pouvons, grâce à leur témoignage de vie, redécouvrir la confiance dont nous avons besoin au milieu de nos difficultés. Nous pourrons nous aider les uns les autres, car eux aussi ont besoin de nous, de notre écoute et de notre soutien pour continuer avec nous leur pèlerinage de foi et d’espérance.
Dominique Fontaine